refus titularisation

Un refus de titularisation peut être annulé par le juge administratif en raison d’un vice de procédure. Nous vous expliquerons le mécanisme avec ce jugement récent du Tribunal administratif de Rennes.

🔷 Faits

Un agent a été recruté le 6 juin 2017 en qualité d’adjoint technique stagiaire par la commune de Combrit.

Dans un premier temps, le maire de la commune de Combrit a décidé de proroger le stage de cet agent. Par un arrêté du 9 octobre 2020, le maire de la commune a mis fin au stage et a refusé de le titulariser.

L’agent concerné saisit le tribunal administratif afin d’obtenir l’annulation de cet arrêté.

🔷 Droit applicable

  • Article 5 du décret du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires

« Le fonctionnaire territorial stagiaire peut être licencié pour insuffisance professionnelle lorsqu’il est en stage depuis un temps au moins égal à la moitié de la durée normale du stage. Le licenciement est prononcé après avis de la commission administrative paritaire compétente pour le cadre d’emplois dans lequel l’intéressé a vocation à être titularisé (…) ».

  • Article 8 du décret du 22 décembre 2006 portant statut particulier du cadre d’emplois des agents techniques territoriaux, dans sa rédaction applicable au présent litige

« Les candidats recrutés en qualité d’adjoint technique territorial de 2e classe sur un emploi d’une collectivité territoriale (…) sont nommés stagiaires par l’autorité territoriale investie du pouvoir de nomination pour une durée d’un an. (…) ».

  • Article 10 du même décret

« A l’issue du stage, les stagiaires dont les services ont donné satisfaction sont titularisés par décision de l’autorité territoriale investie du pouvoir de nomination. (…) Les autres stagiaires peuvent, sur décision de l’autorité territoriale, être autorisés à effectuer un stage complémentaire d’une durée maximale d’un an. Si le stage complémentaire a été jugé satisfaisant, les intéressés sont titularisés. / Les adjoints techniques territoriaux de 2e classe stagiaires () qui n’ont pas été autorisés à effectuer un stage complémentaire, ou dont le stage complémentaire n’a pas été jugé satisfaisant, sont soit licenciés s’ils n’avaient pas auparavant la qualité de fonctionnaire, soit réintégrés dans leur grade d’origine ».

Jurisprudence pertinente :

« Un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne ».

L’autorité compétente ne peut donc prendre légalement une décision de refus de titularisation, qui n’est soumise qu’aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements, que si les faits qu’elle retient caractérisent des insuffisances dans l’exercice des fonctions et la manière de servir de l’intéressé. Cependant, la circonstance que tout ou partie de tels faits seraient également susceptibles de caractériser des fautes disciplinaires ne fait pas obstacle à ce que l’autorité compétente prenne légalement une décision de refus de titularisation, pourvu que l’intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations » (Conseil d’État, 3ème chambre, 9 novembre 2023, 465459, voir également : Conseil d’État, 7ème chambre, 21 décembre 2021, 451412).

=> « pour apprécier la légalité d’une décision de refus de titularisation, il incombe au juge de vérifier qu’elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu’elle n’est entachée ni d’erreur de droit, ni d’erreur manifeste dans l’appréciation de l’insuffisance professionnelle de l’intéressé, qu’elle ne revêt pas le caractère d’une sanction disciplinaire et n’est entachée d’aucun détournement de pouvoir et que, si elle est fondée sur des motifs qui caractérisent une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, l’intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations»  (Conseil d’État, 7ème chambre, 21 décembre 2021, 451412).

L’administration est tenue, avant de refuser de titulariser un agent, de le mettre à même de faire valoir ses observations (Tribunal Administratif de Montreuil, 3ème chambre, 7 mars 2023, 2108210; Tribunal administratif d’Amiens, 1ère Chambre, 6 avril 2023, 2100790). À défaut, le refus de titularisation est annulé.

🔷 Solution retenue

Le tribunal a analysé la procédure ayant mené au refus de titularisation.

Au regard des pièces du dossier, le tribunal a estimé que la décision de refus de titularisation avait été prise à l’issue d’une procédure irrégulière. En effet, l’agent n’a pas été mis en mesure de présenter ses observations avant la notification de la décision de refus de titularisation.

Le tribunal rappelle d’abord le contexte en soulignant qu’il ressort « notamment du rapport de saisine de la commission administrative paritaire, que M. A aurait entaché sa manière de servir au cours de son stage puis lors de ses prorogations d’une insuffisance professionnelle caractérisée d’une part avec le retrait de son permis de conduire qui constituait une condition nécessaire à la réalisation des missions susceptibles de lui être confiées, et qu’il n’avait pas pu le récupérer malgré les prorogations de stage et, d’autre part, en raison d’absences répétées, notamment lors de la formation d’intégration obligatoire du 13 au 21 juin 2019 ».

Par ailleurs, le tribunal indique que dès lors que ces derniers faits étaient susceptibles de caractériser une faute disciplinaire, il appartenait à la commune de Combrit de mettre l’agent à même de faire valoir ses observations.

À cet égard, force est de constater:

  • que le maire de la commune de Combrit a, par un courrier recommandé du 18 août 2020, avisé le 20 août et distribué le 21 août 2020, invité l’agent à un entretien fixé le 21 août 2020 à 11h00 sans précision sur les motifs de cet entretien
  • qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune de Combrit a invité l’agent à présenter des observations avant le 9 octobre, date d’édiction de l’arrêté attaqué.

=> Il résulte de ce qui précède que l’agent n’a pas été utilement invité à faire valoir ses observations et a ainsi été privé d’une garantie. Par suite, la décision a été prise à l’issue d’une procédure irrégulière et doit être annulée.

Pour lire le jugement :

Tribunal administratif de Rennes, 4ème Chambre, 9 juin 2023, 2005451

Sur le même sujet :

Insuffisance professionnelle d’un agent

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