Insuffisance professionnel d'un agent

Le licenciement pour insuffisance professionnelle d’un agent public ne peut être fondé que sur des éléments manifestant son inaptitude à exercer normalement les fonctions.

Faits

Le directeur d’un centre hospitalier a mis fin au stage réalisé par une aide-soignante et l’a licenciée pour insuffisance professionnelle.

L’aide-soignante a saisi le tribunal administratif pour obtenir l’annulation de cette décision. Elle obtient gain de cause. En effet, le tribunal a annulé le licenciement et ordonné sa réintégration. Le Centre hospitalier conteste ce jugement devant la Cour administrative d’appel de Lyon.

Droit applicable
  • Article 37 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : « L’agent peut être licencié au cours de la période de stage après avis de la commission administrative paritaire compétente, en cas de faute disciplinaire ou d’insuffisance professionnelle »
Solution retenue

1/ La Cour administrative d’appel de Lyon rappelle la jurisprudence du Conseil d’Etat concernant le licenciement pour insuffisance professionnelle :

=> « Le licenciement pour insuffisance professionnelle d’un agent public ne peut être fondé que sur des éléments manifestant son inaptitude à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l’exercice de ces fonctions. Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l’insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l’agent, ni qu’elle ait persisté après qu’il a été invité à remédier aux insuffisances constatées. Par suite, une évaluation portant sur la manière dont l’agent a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions est de nature à justifier légalement son licenciement ». ( voir par exemple : Conseil d’État, 7ème – 2ème chambres réunies, 13 avril 2018, 410411).

2/ La Cour administrative d’appel considère que les faits relevaient par le Centre hospitalier n’étaient pas de nature à justifier un licenciement pour insuffisance professionnelle.

Ainsi, dans un premier temps, la Cour rappelle que pour décider de procéder au licenciement pour insuffisance professionnelle avant la fin du stage de cette aide-soignante, le directeur du centre hospitalier  s’est fondé sur le seul témoignage du 11 mars 2019 d’une infirmière dénonçant un comportement, consistant à avoir  » secoué énergiquement  » le déambulateur d’une résidente de l’établissement et des propos inappropriés de la part de l’aide-soignante, qui auraient conduit la résidente, particulièrement vulnérable, à  » pleurer et à avoir des idées suicidaires « .

Or,  la Cour relève que ce seul témoignage, lequel relate des faits qui se seraient produits fin décembre 2018, soit plus de deux mois antérieurement, l’hôpital faisant état, sans le justifier, de la date du 30 décembre 2018, n’est pas suffisant pour caractériser les gestes violents, les propos injurieux et l’attitude autoritaire à l’égard de la résidente, reprochés à l’aide-soignante.

Par ailleurs, la Cour relève que :

  • Ces faits isolés caractériseraient davantage une faute disciplinaire sans nécessairement relever de l’insuffisance professionnelle.
  • L’aide-soignante produit de très nombreuses attestations émanant d’agents de l’établissement, non sérieusement contredites, qui indiquent n’avoir jamais constaté d’actes violents, inadaptés et malveillants de la part de l’intéressée envers des résidents.
  • Les compétences professionnelles de l’agent ne sont pas remises en cause, dès lors que ses évaluations annuelles de 2011 à 2016, obtenues en qualité d’agent contractuel, sont bonnes et que pour l’année 2017 et 2018, période pour laquelle elle a bénéficié d’un contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2017, l’hôpital lui a attribué la mention  » excellent  » pour son rapport avec les résidents hospitalisés.
  • En outre, contrairement à ce qui est soutenu, le procès-verbal de la commission administrative paritaire, qui s’est tenue le 3 mai 2019 et qui est visé dans la décision attaquée, ne porte que sur le seul incident signalé par l’infirmière.
  • Si les difficultés relationnelles de cet agent avec certains de ses collègues, compte tenu de son  » caractère affirmé « , ne sont pas contestées et ont conduit à la prolongation de son stage, elles ne sont pas de nature à justifier son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Ce raisonnement des juges de la Cour administrative les amène à considérer qu’en prononçant cette mesure, le directeur de l’établissement a entaché sa décision d’une erreur d’appréciation. C’est donc à juste titre que le tribunal administratif a annulé la décision prononçant le licenciement pour insuffisance professionnelle de cette aide-soignante.

Pour lire l’arrêt : Cour administrative d’appel de Lyon, 3ème chambre, 31 mai 2023, 20LY03630

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Sur le même sujet, lire également :

Licenciement pour insuffisance professionnelle : évaluation de l’inaptitude

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