refus changement d'affectation

Le refus de se conformer à un changement d’affectation ne constitue pas une faute disciplinaire si la notification de cette affectation n’a pas été faite en temps utile.

En effet, dans cet arrêt commenté, la Cour administrative d’appel de Lyon a annulé la décision du président du conseil départemental de la Savoie prononçant une sanction disciplinaire à l’encontre d’une fonctionnaire.

La Cour a estimé que cette fonctionnaire n’avait pas commis de faute disciplinaire en refusant de se conformer à son changement temporaire d’affectation, étant donné qu’elle n’avait pas reçu notification de cette décision en temps utile.

La Cour a également souligné que cette fonctionnaire n’avait pas manqué à son devoir d’obéissance hiérarchique. La Cour a donc annulé la sanction disciplinaire et a condamné le département de la Savoie à lui verser une somme de 2 000 euros au titre des frais de justice

🔷Faits

Une assistante socio-éducative de première classe du département de la Savoie, affectée depuis le 1er avril 2016 à Saint-Genix-sur-Guiers, a été placée en congé de maladie durant plusieurs mois au titre d’une rechute des conséquences d’un accident de service.

A sa réintégration le 10 janvier 2019, elle a été reçue en entretien pour discuter des modalités de sa reprise et le lendemain, elle a reçu notification d’une lettre de mission l’informant d’une affectation temporaire à Chambéry.

Cette affectation temporaire a été formalisée par une décision du président du conseil départemental du 18 janvier 2019.

Le 21 janvier 2019, elle s’est néanmoins présentée sur son lieu de travail habituel à Saint-Genix-sur-Guiers.

Le lendemain, son médecin lui a prescrit un nouvel arrêt de travail, au vu duquel elle a été placée en congé de maladie au titre de la rechute des conséquences de son accident de service.

Par un arrêté du 8 février 2019, le président du conseil départemental de la Savoie lui a toutefois infligé la sanction disciplinaire de l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours, au motif qu’elle avait le 21 janvier 2019 manqué à son obligation d’obéissance hiérarchique.

Le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté. Elle saisit alors la Cour administrative d’appel.

🔷Droit applicable

Article 28 de la loi du 13 juillet 1983  portant droits et obligations des fonctionnaires, alors applicable :

« Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l’ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. (…) ».

Aux termes de l’article 29 de la même loi :

« Toute faute commise par un fonctionnaire dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions l’expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. (…) ».

Aux termes de l’article 89 de la loi du 26 janvier 1984 visée ci-dessus, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors applicable :

« Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : l’avertissement ; le blâme ; l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours (…) ».

🔷 Solution retenue : Le refus de se conformer à un changement d’affectation ne constitue pas une faute disciplinaire si la notification de cette affectation n’a pas été faite en temps utile

🧿 Sur la motivation de la sanction

La sanction disciplinaire contestée est motivée par la circonstance que cette fonctionnaire aurait refusé de se conformer à la décision du 18 janvier 2019 par laquelle le président du conseil départemental de la Savoie a procédé à son changement d’affectation à titre temporaire.

Pour le conseil départemental de la Savoie, ce refus aurait été manifesté par son retour sur son poste d’origine le 21 janvier 2019, et par un courriel et un recours gracieux datés du même jour.

Toutefois, la cour administrative d’appel relève qu’il ressort des pièces du dossier que la décision du vendredi 18 janvier 2019 a été notifiée à la requérante par un courriel envoyé le jour même à 20h04, après qu’elle a terminé son service, et il n’est pas contesté qu’elle n’en a pris connaissance que le lundi 21 janvier à 9h00, sur les lieux de son ancienne résidence administrative.

➡️ Il ne saurait ainsi lui être reproché de ne pas avoir déféré à une mesure dont elle n’avait pas reçu notification en temps utile. Par ailleurs, il ne ressort pas des termes du recours gracieux formé par l’intéressée qu’elle aurait exprimé par celui-ci son refus de se conformer à son changement temporaire d’affectation, et le département ne produit pas de courriel manifestant un tel refus.

🧿 Sur le manquement au devoir d’obéissance hiérarchique

La cour administrative d’appel relève que si le département de la Savoie a fait valoir devant le tribunal que cette fonctionnaire avait été informée dès le 10 janvier 2019 de son affectation temporaire, confirmée par une lettre de mission, et qu’informée le 21 janvier 2019 de la décision du 18 janvier précédent, elle ne s’était pas rendue le jour même sur le lieu de sa nouvelle affectation à Chambéry, la sanction contestée n’était pas fondée sur ces circonstances.

En outre, il ressortait des pièces du dossier qu’à la suite des interrogations de l’intéressée sur cette affectation temporaire, elle avait été reçue le 17 janvier 2019 par le directeur des ressources humaines du département et son adjointe.

Aucun compte-rendu n’a été établi à l’issue de cet entretien.

Alors cet entretien, cette fonctionnaire avait adressé le 18 janvier au matin un courriel à sa hiérarchie pour l’informer qu’il aurait été convenu qu’elle reprendrait le travail à Saint-Genis-sur-Guiers le lundi suivant. Or, aucune indication ne lui a été apportée avant la fin de sa journée de travail pour lui faire part de ce que son message ne reflétait pas les conclusions de l’entretien de la veille.

Au vu de tous ces éléments, la Cour administrative d’appel a considéré que cette fonctionnaire n’avait pas manqué à son devoir d’obéissance hiérarchique.

💡Cet arrêt confirme que le refus d’un changement temporaire d’affectation ne constitue pas une faute disciplinaire si la notification de cette affectation n’a pas été faite en temps utile. Il souligne également l’importance du respect des droits de la défense dans les procédures disciplinaires.

Cour administrative d’appel de Lyon, 3ème Chambre, 10 janvier 2024, 22LY01794


Voir également:

Affectation d’office d’un agent et harcèlement moral

 

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