Il n’est pas rare de constater des erreurs dans les faits ayant fondé l’OQTF. En effet, parfois nous sommes bien au delà d’une erreur de plume. En effet, il peut s’agir d’une erreur de fait et/ ou d’absence d’examen particulier de la situation de l’étranger faisant l’objet de l’OQTF. Nouvelle illustration.
🔷 Faits
Un ressortissant géorgien né le 5 avril 1984, déclare être entré irrégulièrement en France le 24 octobre 2021 avec deux de ses quatre enfants. Son épouse, Mme D, l’a rejoint le 17 mars 2022, avec ses deux autres enfants. Il a déposé une demande d’asile le 22 décembre 2021.
Par une décision du 26 septembre 2022, le directeur général de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a, dans le cadre de la procédure dite accélérée, rejeté cette demande d’asile. Il forme alors un recours devant la Cour nationale du droit d’asile (CNDA).
Le 14 novembre 2022, le préfet de la Vendée lui a fait obligation de quitter le territoire français (OQTF) dans un délai de trente jours.
Il saisit le tribunal administratif afin d’obtenir l’annulation de cette OQTF, et le cas échéant, la suspension de l’exécution de la mesure d’éloignement prise à son encontre, dans l’attente de la décision de la Cour nationale du droit d’asile à intervenir.
🔷 Droit :
Article L.542-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile :
» En l’absence de recours contre la décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai prévu à l’article L. 532-1, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin à la notification de cette décision. Lorsqu’un recours contre la décision de rejet de l’office a été formé dans le délai prévu à l’article L. 532-1, le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d’asile ou, s’il est statué par ordonnance, à la date de la notification de celle-ci « .
Article L. 611-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose :
» L’autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu’il se trouve dans les cas suivants : () 4° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l’étranger ou si l’étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l’article L. 743-2, à moins qu’il ne soit titulaire d’un titre de séjour en cours de validité ; () La décision énonçant l’obligation de quitter le territoire français est motivée. ( )
Article L. 614-5 du même code :
» Lorsque la décision portant obligation de quitter le territoire français prise en application des 1°, 2° ou 4° de l’article L. 611-1 est assortie d’un délai de départ volontaire, le président du tribunal administratif peut être saisi dans le délai de quinze jours suivant la notification de la décision ().Le président du tribunal administratif ou le magistrat qu’il désigne à cette fin parmi les membres de sa juridiction ou parmi les magistrats honoraires inscrits sur la liste mentionnée à l’article L. 222-2-1 du code de justice administrative statue dans un délai de six semaines à compter de sa saisine. L’étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin le concours d’un interprète et la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise. L’audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du rapporteur public, en présence de l’intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas. L’étranger est assisté de son conseil s’il en a un. Il peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné à cette fin qu’il lui en soit désigné un d’office. ».
🔷 Solution retenue :
La décision attaquée mentionne des faits erronés. En effet, elle mentionne le fait que l’intéressé ne dispose d’aucune attache intense en France, et notamment que l’épouse de M. E A et ses enfants sont restés en Géorgie. Or, il ressort des pièces du dossier, notamment des fiches d’audition des intéressés par un agent de l’OFPRA, que son épouse est entrée sur le territoire national le 17 mars 2022 pour solliciter l’asile et que son fils majeur y est également entré le 26 décembre 2021 pour solliciter lui aussi l’asile. Cette erreur qui est plus qu’une simple erreur de plume constitue une erreur de fait et révèle un défaut d’examen particulier de sa situation personnelle.
Pour ce seul motif, l’obligation de quitter le territoire français attaquée est annulée.
Le tribunal administratif en tire les conséquences: le présent jugement implique nécessairement qu’il soit procédé au réexamen de la situation de ce ressortissant géorgien dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement, en munissant l’intéressé dans un délai de huit jours suivant cette notification d’une autorisation provisoire de séjour lui permettant de travailler dans l’attente de ce réexamen, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette injonction d’une astreinte.
Lire le jugement : Tribunal administratif de Nantes, 12 avril 2023, 2215744
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