pension militaire invalidité taux

Le refus de pension militaire d’invalidité doit d’abord être contesté devant la commission de recours de l’invalidité (CRI). En cas de rejet, notamment fondé sur le taux, il convient de saisir le tribunal administratif. Illustrations avec ce jugement récent.

Faits

Un ancien militaire a été radié des cadres le 13 décembre 2018. Par une demande enregistrée le 13 décembre 2018, il a sollicité l’octroi d’une pension militaire d’invalidité au titre de l’infirmité « séquelles de traumatisme du genou droit sur antécédent de gonalgies » qu’il estime imputable à un accident survenu en service le 30 octobre 2012.

En effet, le 20 octobre 2012,  à l’occasion du service,  il s’était coincé la jambe dans une échelle entraînant sa chute et avait ressenti une vive douleur au genou droit.

Par une décision du 31 janvier 2020, la ministre des armées a rejeté sa demande.

Il a alors formé un recours administratif préalable obligatoire devant la commission de recours de l’invalidité (CRI). Son recours a été rejeté  par une décision du 4 novembre 2020.

Cet ancien militaire a alors saisi le tribunal administratif afin d’obtenir l’annulation de cette décision et l’ouverture de ses droits à pension militaire d’invalidité au titre de cette infirmité.

Par un jugement avant dire droit du 3 mai 2022, le tribunal a ordonné une expertise médicale concernant l’infirmité « séquelles de traumatisme du genou droit sur antécédent de gonalgies ». L’expert désigné par le tribunal, le Dr E, a rendu son rapport le 5 octobre 2022.

Droit applicable
  • L’office du juge en matière de pension militaire d’invalidité 

Lorsqu’il est saisi d’un litige en matière de pensions militaires d’invalidité, il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de se prononcer sur les droits de l’intéressé en tenant compte de l’ensemble des circonstances de fait qui résultent de l’instruction, et aussi, le cas échéant, d’apprécier, s’il est saisi de moyens en ce sens ou au vu de moyens d’ordre public, la régularité de la décision en litige (Conseil d’État, 2ème – 7ème chambres réunies, 9 juillet 2021, 451980; Cour administrative d’appel de Nantes, 6ème chambre, 19 septembre 2023, 21NT03609; Cour administrative d’appel de Toulouse, 2ème chambre, 29 novembre 2022, 21TL01829; Cour administrative d’appel de Paris, 8ème chambre, 16 février 2023, 22PA00606; Cour administrative d’appel de Marseille, 4ème chambre, 13 juin 2023, 22MA00430).

  • Traitement  de la demande de pension militaire d’invalidité 

Article L. 121-2 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre :

« Est présumée imputable au service : / 1° Toute blessure constatée par suite d’un accident, quelle qu’en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, en l’absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l’accident du service ; () ».

Article L. 151-2 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre :

« La pension militaire d’invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l’intéressé après examen, à son initiative, par une commission de réforme selon des modalités fixées par décret en Conseil d’Etat. L’entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande. () ».

=> l’administration doit se placer à la date de la demande de pension de l’intéressé pour évaluer ses droits à pension militaire d’invalidité, et notamment le taux d’invalidité résultant de l’infirmité en cause

  • Critères d’attribution de la pension militaire d’invalidité 

Article de L. 121-1 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre :

«Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par la suite d’événements de guerre ou d’accidents éprouvés par le fait ou à l’occasion du service () « . Aux termes de l’article L. 121-4 du même code :  » Les pensions sont établies d’après le taux d’invalidité résultant de l’application des guides barèmes mentionnés à l’article L. 125-3. Aucune pension n’est concédée en deçà d’un taux d’invalidité de 10 %. ».

Article L. 121-5 du même code :

« La pension est concédée : / 1° Au titre des infirmités résultant de blessures, si le taux d’invalidité qu’elles entraînent atteint ou dépasse 10 % ; () ».

Article L. 125-1 du même code :

« Le taux d’invalidité reconnu à chaque infirmité examinée couvre l’ensemble des troubles fonctionnels et l’atteinte à l’état général. ».

+>  une infirmité doit être regardée comme résultant d’une blessure lorsqu’elle trouve son origine dans une lésion soudaine, consécutive à un fait précis de service. En l’absence de tout fait précis de service ayant causé un traumatisme qui serait à l’origine de l’infirmité litigieuse, celle-ci doit être qualifiée de maladie.(Conseil d’État, 2ème chambre, 29 juin 2023, 465924; Conseil d’État, 7ème chambre, 14 juin 2022, 445971).

Solution retenue

Le tribunal a fait droit à la demande du militaire en considérant que la commission de recours de l’invalidité avait commis une erreur d’appréciation en retenant un taux d’imputabilité au service de seulement 5% au titre de l’infirmité « séquelles de traumatisme du genou droit sur antécédent de gonalgies ».

La décision a donc été annulée. Par ailleurs, le tribunal a fixé  le pourcentage d’invalidité de la pension concédée au militaire  à 11,25 %, à compter du 13 décembre 2018. Enfin, les frais d’expertise ont été mis à la charge de l’Etat.

Le raisonnement du tribunal a été le suivant.

En premier lieu, le tribunal a relevé que pour refuser l’ouverture de ses droits à pension militaire d’invalidité, la ministre des armées a considéré que le taux d’invalidité de 15 % résultant de ses séquelles du genou droit était imputable, pour seulement 5 %, à l’accident de service survenu le 30 octobre 2012, soit en dessous du minimum indemnisable, et à hauteur de 10 % à un état antérieur, à savoir divers traumatismes du genou et en particulier un accident de vélo survenu en dehors du service, le 22 mars 2001.

En second lieu, le tribunal s’est intéressée à la décision de la commission de recours d’invalidité. Il a relevé que la commission de recours de l’invalidité s’était  fondée sur l’avis rendu par le médecin chargé des pensions militaires d’invalidité le 13 janvier 2020.

Cet avis relevait que le militaire présentait une arthrose dégénérative en évolution depuis l’accident survenu en dehors du service le 22 mars 2001, ainsi que sur le dossier médical du requérant qui révèle plusieurs épisodes de gonalgies antérieurs à l’accident du 30 octobre 2012, notamment un traumatisme direct du genou droit lors d’un accident hors service le 22 mars 2001, un syndrome rotulien diagnostiqué en 2006 et des gonalgies récurrentes.

Par la suite, le tribunal s’est intéressé à l’argumentation du militaire.

Le militaire invoquait différents avis médicaux, notamment:

  • un certificat de consolidation émis le 30 août 2018 d’un médecin militaire,
  • une expertise médicale réalisée le 25 mars 2019 ,
  • un certificat médical du 15 juillet 2019 émis par un chirurgien orthopédique,
  • un certificat médical du 10 décembre 2019 émis par un autre chirurgien orthopédique,
  • une expertise médicale réalisée  le 21 juillet 2020.

=> Ces avis imputaient les séquelles de gonalgies subies par le militaire à la rupture de son ligament droit croisé et à l’opération chirurgicale causée par l’accident litigieux du 30 octobre 2012

Par ailleurs, deux certificats médicaux mettaient en évidence le caractère banal et non séquellaire du traumatisme subi au genou droit lors de son accident de vélo du 27 mars 2001 et l’absence d’état antérieur.

En outre, le tribunal a relevé qu’il ressortait du rapport d’expertise du 5 octobre 2022, qu’à la date du 13 décembre 2018, le militaire souffrait d’une raideur articulaire du genou en flexion, de gonalgies droites et de pseudo-blocages. De plus, cette expertise indiquait que la rupture du ligament croisé postérieur justifiant la ligamentoplastie réalisée le 20 juin 2013 était directement liée à l’accident de service du 30 octobre 2012 et que la rupture du ligament croisé ne pouvait être la conséquence que d’une entorse grave du genou droit. Cette expertise concluait que le seul évènement de nature à caractériser une entorse grave du genou droit est l’accident de service survenu le 30 octobre 2012.

Enfin, l’expert désigné par le tribunal concluait à une imputabilité au service de cette infirmité à hauteur de 11,25%.

C’est au vu de l’ensemble de ces éléments que le tribunal a fixé le taux d’invalidité global de l’infirmité « séquelles de traumatisme du genou droit sur antécédent de gonalgies » à 15 % à compter du 13 décembre 2018 dont 10 % indemnisable au titre de l’accident de service du 30 décembre 2012 et 5 % relevant d’un état antérieur.

Pour lire le jugement : Tribunal administratif de Toulouse, 5ème Chambre, 3 octobre 2023, 2006803

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