harcelement moral indeminisation

Lorsqu’un agent est victime, dans l’exercice de ses fonctions, d’agissements répétés de harcèlement moral, il peut solliciter une indemnisation auprès de l’administration, alors même que ces agissements ne résulteraient pas d’une faute qui serait imputable à celle-ci.

Nouvelle illustration avec ce jugement du Tribunal administratif de Paris (Tribunal administratif de Paris, 1ère Chambre, 5 avril 2024, 2214651).

🔷 Faits

Une femme, proviseure adjointe, a demandé une indemnisation en raison du harcèlement moral de la part de sa supérieure hiérarchique. Elle a également sollicité une indemnisation pour la méconnaissance de l’obligation de protection de l’Etat envers ses agents.

L’administration n’a pas répondu à sa demande indemnitaire préalable. Une décision implicite de rejet est donc née.  Elle a alors saisi le tribunal administratif pour obtenir réparation.

🔷 Droit applicable

➡️Harcèlement moral

Article L. 133-2 du code général de la fonction publique :

 » Aucun agent public ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. « 

💡 L’agent public qui soutient avoir été victime d’agissements constitutifs de harcèlement moral doit soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l’existence d’un tel harcèlement.

L’administration doit alors produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement.

💡 Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu’ils sont constitutifs d’un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l’administration auquel il est reproché d’avoir exercé de tels agissements et de l’agent qui estime avoir été victime d’un harcèlement moral (voir par exemple Conseil d’État, 3ème Chambre, 29 juillet 2020, 428283). 

➡️ Demander la protection fonctionnelle en cas de harcèlement moral

Articles L. 134-1 et L. 134-5 du code général de la fonction publique :

 » I.-A raison de ses fonctions et indépendamment des règles fixées par le code pénal et par les lois spéciales, le fonctionnaire ou, le cas échéant, l’ancien fonctionnaire bénéficie, dans les conditions prévues au présent article, d’une protection organisée par la collectivité publique qui l’emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire. () / IV.- La collectivité publique est tenue de protéger le fonctionnaire contre les atteintes volontaires à l’intégrité de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu’une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. « 

💡Il pèse sur la collectivité publique  une obligation de protection de ses agents à laquelle il ne peut être dérogée, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d’intérêt général.

💡Cette obligation de protection a pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles le fonctionnaire ou l’agent public est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu’il a subis.

✅Lorsqu’un agent est victime, dans l’exercice de ses fonctions, d’agissements répétés de harcèlement moral, il peut demander à être indemnisé par l’administration de la totalité du préjudice subi, alors même que ces agissements ne résulteraient pas d’une faute qui serait imputable à celle-ci.

🔷 Solution retenue

➡️ Le tribunal reconnaît les faits de harcèlement moral

Il résulte de l’instruction que la proviseure a tenu la proviseure adjointe à l’écart du fonctionnement du service alors même qu’elle était son adjointe. Le tribunal relève notamment :

  • que la proviseure adjointe n’avait pas reçu de fiche de mission de la rentrée scolaire 2017 au mois d’avril 2019 en dépit de ses demandes à la cheffe d’établissement en ce sens.
  • les courriers électroniques produits par la proviseure adjointe permettent de tenir pour établie l’allégation selon laquelle la proviseure ne l’associait pas entièrement au pilotage de l’établissement, notamment lors des conseils d’enseignement, et ne lui communiquait pas l’ensemble des informations nécessaires à l’exercice de ses fonctions.
  • Souffrant de cette situation, la proviseure adjointe  a été arrêtée du 23 juin au 31 août 2019 puis mutée en dehors de l’établissement à compter de la rentrée 2019.

❌Contrairement à ce que soutient le recteur, ces agissements répétés, qui ont eu pour effet de dégrader les conditions de travail de l’agent et ont altéré sa santé, excèdent les limites de l’exercice normal du pouvoir hiérarchique. Ainsi, ils revêtent le caractère d’un harcèlement moral.

➡️ Le tribunal accorde une indemnisation pour le harcèlement moral subi

Le harcèlement moral subi par cette proviseure adjointe lui ouvre droit à une indemnisation .

Le tribunal relève qu’elle a subi un harcèlement moral de la part de sa supérieure hiérarchique pendant près de deux années et a été contrainte de demander son affectation en dehors de l’établissement à compter de la rentrée 2019.

Le tribunal relève également la détérioration de son état de santé sur cette période.

✅Une indemnisation de 8000 euros lui est accordée en raison du préjudice moral subi et des troubles dans ses conditions d’existence.

Assez classiquement, cette indemnisation est assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire préalable, soit le 8 mars 2022.

Pour lire le jugement : Tribunal administratif de Paris, 1ère Chambre, 5 avril 2024, 2214651

Sur le même sujet :

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Le harcèlement moral se caractérise par des agissements répétés qui ont pour objet ou effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité de l’agent, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Cela peut inclure des intimidations, des critiques constantes, l’isolement professionnel ou d’autres formes de comportements dégradants et humiliants.

Il est conseillé de signaler les faits et de documenter chaque fait caractérisant le harcèlement moral  (dates, descriptions détaillées des faits, témoins éventuels, et toute communication écrite).

L’agent peut solliciter ka protection fonctionnelle qui doit être formalisée par écrit. Dans ce cas, il convient d’expliquer la situation et les faits de harcèlement moral en produisant tout élément utile à la compréhension de la situation et permettant de qualifier les faits de harcèlement moral.

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Sur le même sujet :

Affectation d’office d’un agent et harcèlement moral

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