Faits
Un brigadier-chef de la police nationale exerçait les fonctions de musicien saxophoniste au sein de la formation de la musique de la Police nationale. Par ailleurs, il exerçait également, depuis 2001, diverses activités accessoires d’enseignement de 2001 à 2014, avec l’autorisation de sa hiérarchie.
En 2013 et 2014, ce fonctionnaire a présenté plusieurs demandes d’autorisations de cumul pour enseigner au sein de conservatoires et participer à divers jurys. C’est dans ce cadre qu’il a formulé une demande d’autorisation de cumul d’activités afin de continuer à enseigner au sein du conservatoire de Nanterre. Cette demande portait sur un volume 11h hebdomadaires, à compter du 1 septembre 2014 et pour une durée indéterminée.
Par plusieurs décisions, l’administration a refusé d’autoriser ce cumul d’activités. Toutefois, ces décisions ont été annulées par le tribunal administratif de Versailles (à l’exception d’une décision).
À la suite de ces annulations, ce fonctionnaire a formé une demande en vue d’obtenir la réparation des différents préjudices subis (moral, financier et de perte de chance de retrouver un poste équivalent).
Le tribunal administratif de Versailles a alors condamné l’Etat à lui verser la somme de 21 263, 84 euros. Cette somme a été rectifiée et majorée par la Cour administrative d’appel de Versailles qui avait été saisie par ce fonctionnaire. L’Etat a alors été condamné à verser la somme de 24 763,84 euros.
Le fonctionnaire décide alors de saisir le Conseil d’Etat.
La question centrale reposait sur le montant du préjudice financier de ce fonctionnaire et tout particulièrement sur le calcul de ce montant. En effet, ce fonctionnaire avait demandé une autorisation de cumul d’activités pour une durée indéterminée.
La Cour administrative d’appel avait considéré qu’il ne pouvait pas être indemnisé au-delà de la période scolaire 2014-2015 car une autorisation de cumul d’activités ne pouvait jamais être demandée et délivrée que pour une durée limitée.
Droit applicable
- Rappel de l’évolution des textes en matière de cumul d’activités
Dans cette affaire, le texte applicable est le décret n° 2007-658 du 2 mai 2007 relatif au cumul d’activités des fonctionnaires, des agents non titulaires de droit public et des ouvriers des établissements industriels de l’Etat
Ce décret a été remplacé par le décret n° 2017-105 du 27 janvier 2017 qui était en vigueur jusqu’au 1er février 2020. En effet, le décret n° 2020-69 du 30 janvier 2020 relatif aux contrôles déontologiques dans la fonction publique est ensuite entrée en vigueur.
- Jurisprudence
Il convient de se référer notamment à la décision du Conseil d’Etat du 27 juillet 2016, n° 395292. Dans cette décision, le Conseil d’Etat avait notamment jugé que :
« S’il est permis à l’agent de former une demande d’autorisation de cumul sans en préciser le terme, l’administration est dans tous les cas tenue de veiller au respect de la compatibilité entre l’activité accessoire envisagée et les fonctions principales du fonctionnaire, lesquelles sont susceptibles d’évolution. La loi du 13 juillet 1983 et le décret du 2 mai 2007 ont ainsi, implicitement, mais nécessairement, donné à l’autorité appelée à statuer sur une demande d’autorisation de cumul le pouvoir soit d’accorder celle-ci pour une durée plus courte que celle qui était demandée, soit de lui fixer un terme alors qu’elle était sollicitée pour une durée indéterminée ».
Ainsi, on peut retenir de cette décision:
Solution retenue
En suivant les conclusions du rapporteur public, le Conseil d’Etat confirme la décision de 2016 et retient qu’une autorisation de cumul d’activités peut être demandée et accordée pour une durée indéterminée :
« Sous réserve du cas où elles prévoient expressément que les activités sont exercées à titre accessoire pour une durée limitée, les dispositions mentionnées aux points 3 et 4 ne font pas obstacle à ce qu’une demande d’autorisation de cumul d’activités soit formée sans en préciser le terme. Si l’autorité appelée à statuer sur une telle demande peut lui fixer un terme, elle n’y est toutefois pas tenue, sans préjudice de la possibilité qu’elle a de s’opposer à tout moment, dans l’intérêt du service, à la poursuite de l’activité dont l’exercice a été autorisé et de l’obligation faite à l’intéressé de solliciter une nouvelle autorisation pour tout changement substantiel intervenant dans les conditions d’exercice ou de rémunération de l’activité qu’il exerce à titre accessoire ».
Par suite, en jugeant qu’une autorisation de cumul d’activités ne peut être demandée et délivrée que pour une durée limitée, pour en déduire que le requérant ne saurait valablement soutenir que sa demande d’indemnisation du préjudice financier résultant de l’illégalité de la décision de refus d’autorisation de cumul d’activités du 27 février 2014 pourrait se rapporter à une période postérieure à l’année scolaire 2014-2015, la Cour administrative d’appel de Versailles a commis une erreur de droit.
Pour lire la décision : Conseil d’État, 7ème – 2ème chambres réunies, 19 juillet 2023, 464504
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