
➡️ Un refus de titularisation en fin de stage peut-il être motivé par une insuffisance professionnelle établie par des faits antérieurs au stage ? Réponse du Conseil d’Etat : OUI !
🔷 Faits
Le président du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a refusé de titulariser un agent et a prononcé un licenciement pour insuffisance professionnelle.
Cet agent a saisi le Tribunal administratif afin d’obtenir:
- l’annulation de cette décision
- la réintégration
- la titularisation
Le tribunal administratif et la Cour administrative d’appel lui ont donné raison. Le CNRS a alors saisi le Conseil d’Etat.
🔷 Droit applicable : refus de titularisation et insuffisance professionnelle
Article 24 du décret du 30 décembre 1983 fixant les dispositions statutaires communes aux corps de fonctionnaires des établissements publics scientifiques et technologiques, alors applicable :
» Les chargés de recherche sont nommés en qualité de stagiaires par le directeur général de l’établissement. (…) / Les stagiaires sont titularisés, après avis de l’instance compétente d’évaluation, lorsqu’ils ont accompli un an d’exercice de leurs fonctions. / (…) Les stagiaires qui à l’issue de la période de stage ne sont pas titularisés, sont réintégrés dans leur corps d’origine ou licenciés. / (…) « .
💡 Un agent public ayant, à la suite de son recrutement ou dans le cadre de la formation qui lui est dispensée, la qualité de stagiaire se trouve dans une situation probatoire et provisoire. La décision de ne pas le titulariser en fin de stage est fondée sur l’appréciation portée par l’autorité compétente sur son aptitude à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé et, de manière générale, sur sa manière de servir, et se trouve ainsi prise en considération de sa personne.
💡L’autorité compétente ne peut donc prendre légalement une décision de refus de titularisation, qui n’est soumise qu’aux formes et procédures expressément prévues par les lois et règlements, que si les faits qu’elle retient caractérisent des insuffisances dans l’exercice des fonctions et la manière de servir de l’intéressé. Cependant, la circonstance que tout ou partie de tels faits seraient également susceptibles de caractériser des fautes disciplinaires ne fait pas obstacle à ce que l’autorité compétente prenne légalement une décision de refus de titularisation, pourvu que l’intéressé ait alors été mis à même de faire valoir ses observations (voir par exemple : CE, 3-8 chr, 24 févr. 2020, n° 421291).
Sur la possibilité de faire valoir ses observations : CAA Nancy, 4e ch. – formation à 3, 28 mai 2024, n° 23NC03572.; Tribunal administratif de Nice, 4ème chambre, 15 janvier 2025, n° 2104193
De quelle manière le juge doit analyser la légalité de la décision ?
➡️Pour apprécier la légalité d’une décision de refus de titularisation, il incombe au juge de vérifier qu’elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts, qu’elle n’est entachée ni d’erreur de droit, ni d’erreur manifeste dans l’appréciation de l’insuffisance professionnelle de l’intéressé, qu’elle ne revêt pas le caractère d’une sanction disciplinaire et n’est entachée d’aucun détournement de pouvoir et que, si elle est fondée sur des motifs qui caractérisent une insuffisance professionnelle mais aussi des fautes disciplinaires, l’intéressé a été mis à même de faire valoir ses observations ( voir par exemple: CE, 3e chs, 9 nov. 2023, n° 465459. )
🔷 Solution retenue par le Conseil d’Etat
Le CNRS gagne devant le Conseil d’Etat qui considère que :
« La seule circonstance que les faits établissant l’insuffisance professionnelle de l’agent à exercer les fonctions auxquelles il peut être appelé soient antérieurs à la période du stage n’est pas de nature à faire obstacle à ce qu’ils justifient une décision de refus de titularisation »
Pour lire la décision : Conseil d’État, 12 février 2025, 494075
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