droits obligations fonctionnaires

Les droits et obligations des fonctionnaires sont codifiés dans le Code général de la fonction publique (CGFP), qui regroupe les principes fondamentaux issus de la loi et des règlements, et qui sont régulièrement interprétés et précisés par les juridictions. Des décrets viennent également préciser certains points particuliers dans chaque fonction publique.

Dans cet article, nous abordons certains droits et obligations.

🔷 Droits des fonctionnaires

Le droit à la protection fonctionnelle

L’un des droits fondamentaux des fonctionnaires est le droit à la protection fonctionnelle, qui les protège lorsqu’ils font l’objet de menaces, d’agressions ou d’atteintes à leur personne en raison de leurs fonctions. Ce droit inclut également la protection juridique en cas de poursuites judiciaires liées à l’exercice de leurs missions.

L’article L. 134-1 du CGFP prévoit :

« L’administration est tenue d’accorder sa protection aux fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions ou à raison de celles-ci, contre les attaques, violences, menaces ou injures dont ils peuvent être victimes. »

Le Conseil d’État a jugé qu’un agent public est en droit de demander la protection fonctionnelle contre les actes de son supérieur hiérarchique qui, par leur gravité ou leur nature, sont insusceptibles de se rattacher à l’exercice normal du pouvoir hiérarchique, et que le supérieur hiérarchique ainsi mis en cause ne saurait, sans manquer au principe d’impartialité, statuer sur une telle demande (Conseil d’État, 29 juin 2020, n° 423996).

Ce principe est régulièrement rappelé :

« Toutefois, il résulte du principe d’impartialité que le supérieur hiérarchique mis en cause à raison d’actes insusceptibles de se rattacher à l’exercice du pouvoir hiérarchique ne peut régulièrement, quand bien même il est l’autorité compétente pour prendre une telle décision, statuer sur la demande de protection fonctionnelle présentée pour ce motif par son subordonné. Le chef de l’exécutif territorial ne peut donc, par exception à sa compétence de principe, régulièrement, sans méconnaître le principe d’impartialité, se prononcer lui-même sur une demande de protection fonctionnelle au titre d’agissements constitutifs de harcèlement faisant état de circonstances objectives mettant sérieusement en cause son propre comportement » (CAA NANTES, 2 février 2021, n° 19NT01828, voir également en ce sens CAA de DOUAI, 3ème chambre, 3 février 2022, 20DA02055).

La protection fonctionnelle est un principe général du droit (Conseil d’Etat, 26 avril 1963, n°42783, CH Besançon).

La décision n° 2024-1106 QPC du Conseil constitutionnel, rendue le 11 octobre 2024, a  mis en lumière une limite importante : la protection fonctionnelle, bien qu’essentielle, n’est pas reconnue comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République (PFRLR).

 Le droit à la formation

Les fonctionnaires ont également droit à la formation professionnelle tout au long de leur carrière. Ce droit vise à garantir l’adaptation des compétences des agents aux évolutions des missions de service public et à permettre leur progression professionnelle. Les formations peuvent être proposées dans le cadre du plan de formation de l’administration ou à l’initiative des agents eux-mêmes.

Référence législative :

  • Article L. 421-1 du CGFP :

« Le droit à la formation professionnelle tout au long de la vie est reconnu à l’agent public. Il favorise son développement professionnel et personnel. Il facilite son parcours professionnel, sa mobilité et sa promotion ainsi que l’accès aux différents niveaux de qualification professionnelle existants. Il permet son adaptation aux évolutions prévisibles des métiers. Il concourt à l’égalité d’accès aux différents grades et emplois, en particulier entre femmes et hommes, et à la progression des personnes les moins qualifiées. »

  • Article L. 421-2 CGFP :

« Les administrations, collectivités et établissements mentionnés à l’article L. 2 mettent en œuvre, au bénéfice de leurs agents, une politique coordonnée de formation professionnelle et de promotion sociale tout au long de la vie.
Cette politique semblable par sa portée et par les moyens employés à celle définie au titre Ier du livre III de la sixième partie du code du travail, à l’exception de son chapitre V, tient compte du caractère spécifique de la fonction publique. »

Pour un exemple récent concernant un refus de prise en charge d’une formation concernant un refus de prise en charge du coût d’une formation à l’institut de formation en soins infirmiers : TA Amiens, 2e ch., 17 oct. 2024, n° 2201712.

Le droit de grève

Bien que soumis à certaines restrictions, les fonctionnaires bénéficient du droit de grève, un droit constitutionnel en France. Toutefois, en raison de la nature particulière de leurs missions et de l’importance de la continuité du service public, certaines catégories de fonctionnaires peuvent voir leur droit de grève limité, notamment dans les secteurs régaliens comme la police ou la justice. Les fonctionnaires disposent du droit de grève mais sont soumis selon leur affectation (FPE, FPH, FPT) à des modalités différentes concernant l’exercice de ce droit.

L’article L. 114-1 du CGFP dispose que :

« Les agents publics exercent le droit de grève dans le cadre des lois qui le réglementent. »

L’article L114-3 du CGFP prévoit que :

« Les fonctionnaires actifs de la police nationale et les fonctionnaires des services déconcentrés de l’administration pénitentiaire ne jouissent pas du droit de grève.
Toute cessation concertée du service, tout acte collectif d’indiscipline caractérisée de la part de ces fonctionnaires peuvent être sanctionnés sans consultation préalable de l’organisme siégeant en conseil de discipline prévu à l’article L. 532-5. Les personnes mises en cause sont mises à même de présenter leurs observations sur les faits qui leur sont reprochés ».

Le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle. Il est consacré au septième alinéa du préambule de la constitution de la IVème République.

Le droit de grève présente également le caractère d’une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative ( CE, 1re et 2e ss-sect. réunies, 9 déc. 2003, n° 262186). 

Pour une suspension d’un arrêté réquisitionnant nominativement en leur qualité de sages-femmes du service gynécologie-obstétrique voir CE, 1re et 2e ss-sect. réunies, 9 déc. 2003, n° 262186,

Le droit syndical

Les fonctionnaires disposent du droit syndical, leur permettant de se regrouper en syndicats pour défendre leurs intérêts professionnels. Ils peuvent également participer à la gestion de certaines instances comme les commissions administratives paritaires (CAP), qui examinent les questions relatives à leur carrière (promotion, mutation, discipline).

L’article L. 113-1 du CGFP dispose que :

« Le droit syndical est garanti aux agents publics, qui peuvent librement créer des organisations syndicales, y adhérer et y exercer des mandats. »

Le droit syndical a acquis une valeur constitutionnelle par son inscription à l’alinéa 6 du préambule de la Constitution de 1946.

La liberté syndicale est également reconnue au premier alinéa de l’article 1 de la Convention européenne des Droits de l’Homme (CEDH) qui stipule :

« toute personne a le droit de prendre part à des réunions pacifiques et de créer des associations – y compris des syndicats – ou d’y adhérer » .

Il convient également de se référer aux décrets concernant les trois  versants de la fonction publique :

Il est régulièrement rappelé que :

 » Si les agents publics qui exercent des fonctions syndicales disposent de la liberté d’action et d’expression particulière qu’exigent l’exercice de leur mandat et la défense des intérêts des personnels qu’ils représentent, cette liberté doit être conciliée avec le respect des règles encadrant l’exercice du droit syndical dans la fonction publique et le droit de grève, ainsi que de leurs obligations déontologiques et des contraintes liées à la sécurité et au bon fonctionnement du service »  ( CE, 2-7 chr, 30 déc. 2021, n° 445128; pour une application récente : TA Caen, 2e ch., 27 nov. 2024, n° 2300411).

 🔷  Les obligations des fonctionnaires

L’obligation de neutralité

Les fonctionnaires sont soumis à une obligation de neutralité stricte, ce qui signifie qu’ils ne peuvent manifester leurs opinions politiques, religieuses ou syndicales dans l’exercice de leurs fonctions. Cette obligation garantit que les services publics sont rendus de manière impartiale, sans discrimination, et dans le respect de l’égalité des usagers.

L’article L. 121-2 du CGFP dispose que :

« Dans l’exercice de ses fonctions, l’agent public est tenu à l’obligation de neutralité. Il exerce ses fonctions dans le respect du principe de laïcité. À ce titre, il s’abstient notamment de manifester ses opinions religieuses. Il est formé à ce principe. L’agent public traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité.»

Pour une décision récente en la matière : TA Cergy-Pontoise, 4e ch. (ju), 9 nov. 2023, n° 2207935.

L’obligation de réserve

L’obligation de réserve impose aux fonctionnaires de faire preuve de retenue dans l’expression de leurs opinions personnelles, notamment sur des sujets liés à leur travail. Cette obligation s’applique aussi bien dans le cadre professionnel qu’en dehors, dans la mesure où les propos tenus peuvent affecter l’image de l’administration.

L’article L. 121-2 du CGFP dispose que :

« Dans l’exercice de ses fonctions, l’agent public est tenu à l’obligation de neutralité. Il exerce ses fonctions dans le respect du principe de laïcité. À ce titre, il s’abstient notamment de manifester ses opinions religieuses. Il est formé à ce principe. L’agent public traite de façon égale toutes les personnes et respecte leur liberté de conscience et leur dignité. »

L’article L. 121-7 du CGFP dispose que :

« L’agent public doit faire preuve de discrétion professionnelle pour tous les faits, informations ou documents dont il a connaissance dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions.
En dehors des cas expressément prévus par les dispositions en vigueur, notamment en matière de liberté d’accès aux documents administratifs, il ne peut être délié de cette obligation que par décision expresse de l’autorité dont il dépend. »

Cette obligation de réserve est précisée par la jurisprudence  (CE, 15 janvier 1935, Bouzanquet, n°40842); Elle s’applique  tant dans l’exercice de leurs fonctions qu’en dehors (CE, 22 décembre 1965, Sieur Vialle, n°65397 ; CE, 9 décembre 1970, Beauville, n°79732).

L’agent de la fonction publique doit respecter le devoir de réserve, même s’il s’exprime sous pseudonyme sur des sites Internet (CE, 27 juin 2018, n°412541).

L’bligation d’obéissance hiérarchique

L’article  L121-10 du code de la fonction publique dispose que :

 » L’agent public doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l’ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public ».

Pour une décision récente, voir par exemple : TA Lyon, 8e ch., 6 déc. 2024, n° 2305261.

Obligation d’effectuer les tâches confiées

L’article L121-9 du CGFP prévoit que :

« L’agent public, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées.
Il n’est dégagé d’aucune des responsabilités qui lui incombent par la responsabilité propre de ses subordonnés »

À titre d’exemple, le fait d’avoir refusé sans motif légitime de participer, alors pourtant que son supérieur hiérarchique le lui avait explicitement demandé le 17 avril 2020, à l’entretien de recrutement d’un candidat constitue une faute ( CAA Lyon, 3e ch. – formation à 3, 30 oct. 2024, n° 23LY00603 )

Le secret professionnel

L’article L121-6 du code de la fonction publique dispose que :

 » L’agent public est tenu au secret professionnel dans le respect des articles 226-13 et 226-14 du code pénal »

Aux termes de l’article 226-13 du code pénal :

« La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ».

Pour un exemple récent concernant la divulgation d’informations préalablement à un entretien de recrutement : CAA Nancy, 3e ch. – formation à 3, 21 mars 2023, n° 20NC02772.

***

La connaissance et le respect de ces droits et obligations sont essentiels pour tout fonctionnaire, afin de garantir le bon fonctionnement du service public. Le non-respect des obligations peut entraîner des sanctions disciplinaires.

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Categories: Fonction Publique

Shanffou

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