révocation fonctionnaire

Le 19 septembre 2024, le Tribunal administratif de Lyon a rendu une décision intéressante concernant la demande de réintégration d’un fonctionnaire révoqué à la suite d’une procédure pénale classée sans suite. La question de la révocation d’un fonctionnaire, même après un classement sans suite, suscite toujours des interrogations. La révocation d’un fonctionnaire reste une procédure complexe.

Cette affaire soulève des questions essentielles sur les droits des fonctionnaires et les obligations de l’administration en matière de réexamen de la situation administrative après une procédure pénale.

🔷  Faits

Un inspecteur du permis de conduire, a été révoqué de ses fonctions en raison de manquements professionnels présumés.

Par la suite, la procédure pénale engagée à son encontre a été classée sans suite. Estimant que cette décision judiciaire devait entraîner sa réintégration, il a alors sollicité le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer pour un réexamen de sa situation administrative. Face à l’absence de réponse explicite, équivalant à un refus implicite, ce fonctionnaire a saisi le Tribunal administratif de Lyon pour contester ce refus et demander sa réintégration.

Ce cas de révocation d’un fonctionnaire illustre bien la complexité du processus et met en lumière la nature délicate de la révocation d’un fonctionnaire.

🔷  Droit applicable

La procédure disciplinaire est indépendante de la procédure pénale.

Pour des exemples récents :

« la procédure disciplinaire est indépendante de la procédure pénale. Par suite, la commune de Toulouse n’a pas méconnu le principe de la présomption d’innocence, en engageant une procédure disciplinaire et en prononçant une sanction à l’encontre de l’appelante, parallèlement à la procédure pénale et sans attendre que les juridictions répressives aient définitivement statué, y compris pour des faits identiques, étrangers ou non à l’exercice des fonctions de Mme B. » Cour administrative d’appel de Toulouse, 3ème Chambre, 15 octobre 2024, 22TL22469 ; Conseil d’État, 27 mai 2009, 310493, Publié au recueil Lebon )

« Considérant, en cinquième lieu, que si M. A fait valoir que la cour a commis une erreur sur la matérialité des faits ayant conduit à sa révocation au motif que ceux-ci ont donné lieu à un classement sans suite par le procureur de la République pour infraction insuffisamment caractérisée, d’une part, l’autorité investie du pouvoir disciplinaire n’est pas liée par les appréciations de l’autorité de poursuite en matière pénale, d’autre part, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que tant l’enquête administrative menée sur le fonctionnement du service du centre hospitalier où exerçait M. A que les divers courriers et attestations rédigés par des membres du personnel soignant de ce service, établissent la matérialité des faits reprochés »

« La circonstance que la plainte pénale ait été classée sans suite pour « infraction insuffisamment caractérisée » ne faisait pas obstacle à ce que le directeur prenne en compte les faits dénoncés, qui sont suffisamment établis alors que l’intéressée a été remontée dans sa chambre en larmes et que l’un des deux infirmiers est venu lui présenter des excuses. Ces faits présentent, comme l’a reconnu le tribunal, un caractère fautif ». Cour administrative d’appel de Bordeaux, 2ème Chambre, 11 juillet 2024, 22BX01293

🔷   Solution retenue

Le Tribunal administratif de Lyon a rejeté la requête de ce fonctionnaire., confirmant ainsi le refus implicite de réintégration opposé par le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer.

Le tribunal a estimé que la décision de classement sans suite de la procédure pénale ne remettait pas en cause les faits ayant conduit à sa révocation. Il a également souligné que l’administration n’était pas tenue de réexaminer la situation administrative du fonctionnaire en l’absence de nouveaux éléments probants :

« Si l’intervention de la mesure de classement sans suite constitue une circonstance nouvelle de nature à entraîner, pour l’administration, s’agissant d’un fonctionnaire révoqué, l’obligation de procéder à un nouvel examen de sa situation pour rechercher, si, compte tenu de l’intervention de cette mesure mettant fin à la procédure judiciaire qui avait révélé les faits à l’origine de la procédure disciplinaire dont il a fait l’objet, il pouvait ou non être rétabli dans ses fonctions, celle-ci ne saurait toutefois impliquer un droit pour l’intéressé à obtenir sa réintégration ».

Cette décision réaffirme le principe selon lequel une procédure pénale et une procédure disciplinaire sont indépendantes l’une de l’autre. Ainsi, un classement sans suite en matière pénale n’implique pas automatiquement la réintégration du fonctionnaire concerné. L’administration conserve la faculté d’apprécier la gravité des manquements professionnels et de maintenir, le cas échéant, les sanctions disciplinaires prononcées.

Cette affaire met en lumière l’importance pour les fonctionnaires de fournir des éléments nouveaux et substantiels lorsqu’ils sollicitent un réexamen de leur situation administrative après une décision judiciaire favorable. Elle souligne également la nécessité pour l’administration de motiver ses décisions, même implicites, afin de garantir la transparence et le respect des droits des agents publics.

 🔷 À retenir

Le classement sans suite d’une procédure pénale n’entraîne pas automatiquement la réintégration d’un fonctionnaire révoqué pour des manquements déontologiques. La révocation d’un fonctionnaire et la procédure disciplinaire dans la fonction publique obéissent à des règles strictes, garantissant les droits de l’agent et la proportionnalité de la sanction.

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Tribunal administratif de Lyon, 7ème Chambre, 19 septembre 2024, 2208178

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