licenciement médecin vacataire

La Cour administrative d’appel de Paris a annulé la décision de licenciement d’une médecin vacataire par la commune de Livry-Gargan. Les juges ont considéré que les fautes reprochées à l’agent n’étaient pas établies et que la sanction de licenciement était disproportionnée. Ils ont donc ordonné la réintégration de l’agent dans son emploi. Les juges se sont fondés sur les dispositions du décret du 15 février 1988 et de la loi du 13 juillet 1983 pour apprécier la faute et la proportionnalité de la sanction.

🔷 Faits

Un agent de la fonction publique territoriale, a été recruté par la commune de Livry-Gargan en qualité de vacataire pour exercer dans les crèches municipales en qualité de médecin généraliste.

Elle a été licenciée par une décision du maire de la commune de Livry-Gargan en date du 29 août 2018, pour des motifs disciplinaires tirés d’un manquement à l’obligation d’obéissance et d’un défaut de demande d’autorisation de cumul d’emplois.

Elle a formé un recours gracieux à l’encontre de cette décision. Son recours a été rejeté par une décision du 19 décembre 2018. Elle a alors saisi le tribunal administratif afin d’obtenir l’annulation de son licenciement en tant que médecin vacataire. Ce médecin sollicitait également le versement de la somme de 91 978,20 euros en réparation des préjudices subis.

C’est dans ce cadre, qu’elle a saisi la cour administrative d’appel pour obtenir l’annulation du jugement du tribunal administration mais aussi sa réintégration.

Par ailleurs, elle demandait à la Cour d’enjoindre à la commune de Livry Gargan de procéder à la révision de sa situation au titre des périodes d’engagement en qualité de vacataire, du 25 mai 1998 au 5 septembre 2018, en lui versant la différence entre ce qu’elle a perçu en tant que vacataire et ce qu’elle aurait dû percevoir en tant qu’agent non titulaire, et de régulariser, le cas échéant, les cotisations auprès des organismes sociaux et de retraite compétents.

🔷 Droit applicable

Article 36 du décret du 15 février 1988 pris pour l’application de l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale :

« Tout manquement au respect des obligations auxquelles sont assujettis les agents publics, commis par un agent contractuel dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions est constitutif d’une faute l’exposant à une sanction disciplinaire, sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par le code pénal « . Et aux termes de l’article 36-1 de ce même décret :  » Les sanctions disciplinaires susceptibles d’être appliquées aux agents contractuels sont les suivantes : /1° L’avertissement ; /2° Le blâme ; /3° L’exclusion temporaire des fonctions avec retenue de traitement pour une durée maximale de six mois pour les agents recrutés pour une durée déterminée et d’un an pour les agents sous contrat à durée indéterminée / 4° Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement (…) »..

➡️ Il appartient au juge, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l’objet d’une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

Article 1-1 du décret du 15 février 1988 (II -2°) de pris pour l’application de l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale :

« L’agent contractuel est, quel que soit son emploi, responsable de l’exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l’ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public (…) »..

Article 32 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires:

«  (…) II. -Sauf dispositions législatives ou réglementaires contraires, sont applicables aux agents contractuels (…) le présent chapitre IV, à l’exception de l’article 30 ».

Article 25 septies figurant au chapitre IV intitulé  » Des obligations et de la déontologie  » de cette loi :

«  I. -Le fonctionnaire consacre l’intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées (…) IV. -Le fonctionnaire peut être autorisé par l’autorité hiérarchique dont il relève à exercer à titre accessoire une activité, lucrative ou non, auprès d’une personne ou d’un organisme public ou privé dès lors que cette activité est compatible avec les fonctions qui lui sont confiées et n’affecte pas leur exercice (…) ».

Aux termes de l’article 5 du décret du 27 janvier 2017 relatif à l’exercice d’activités privées par des agents publics et certains agents contractuels de droit privé ayant cessé leurs fonctions, aux cumuls d’activités et à la commission de déontologie de la fonction publique :

« Dans les conditions fixées aux I et IV de l’article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 précitée et celles prévues par le présent décret, l’agent peut être autorisé à cumuler une activité accessoire avec son activité principale, sous réserve que cette activité ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l’indépendance ou à la neutralité du service ou ne mette pas l’intéressé en situation de méconnaître l’article 432-12 du code pénal. Cette activité peut être exercée auprès d’une personne publique ou privée (…) »..

Article 6 du décret du 27 janvier 2017 :

« Les activités exercées à titre accessoires susceptibles d’être autorisées (…) : / (…) h) Une activité d’intérêt général exercée auprès d’une personne publique (…) »

🔷 Solution retenue : annulation du licenciement du médecin vacataire

🧿 Faits reprochés au médecin vacataire

La directrice de la petite enfance de la commune, supérieure hiérarchique de ce médecin vacataire, l’a rencontrée le 30 avril 2018 et lui a fait part de sa volonté d’organiser le travail des équipes des crèches.

A cette fin, elle a sollicité par un courriel du 2 mai 2018 la communication d’un planning mentionnant les horaires de ce médecin médecin vacataire dans chaque crèche.

Le médecin vacataire, y a répondu en mettant en copie le directeur général des services et l’élu du secteur, en indiquant qu’elle refusait de fournir le planning demandé, en renvoyant la directrice aux textes organisant la présence d’un médecin dans certains établissements et en concluant :

« Enfin, sachez Madame, que vous n’êtes en aucun cas ma supérieure hiérarchique concernant ma profession de médecin au sein des établissements d’accueil du jeune enfant de la ville de Livry-Gargan. Vous l’êtes seulement d’un point de vue administratif ».

D’autre part, par un courriel du 15 juin 2018, la directrice du service a informé ce médecin vacataire qu’elle ne pouvait valider les 120 heures de travail déclarées par cette dernière au titre du mois de mai 2018 dès lors qu’elle n’avait été présente que 85 heures dans les structures.

Par un courriel du 18 juin 2018, le médecin vacataire a répondu à l’intéressée, de manière vindicative, en mettant en copie le maire, l’élue en charge du secteur, l’ensemble des directrices de crèche et le directeur général adjoint, remettant en cause le constat du nombre d’heures effectivement réalisées en le qualifiant de mensonger, exigeant des excuses et précisant qu’elle communiquerait à l’avenir un état global des heures réalisées sans préciser le lieu et le temps d’exercice pour chacun des établissements, et que ses congés n’avaient pas à être soumis à autorisation.

➡️ La cour administrative d’appel considère que les écrits de ce médecin vacataire en date du 2 mai et du 18 juin 2018 révèlent des manquements fautifs à l’obligation d’obéissance à l’autorité hiérarchique, à laquelle il revenait de superviser son activité. Le cas échéant, sa supérieure hiérarchique pouvait également contrôler l’effectivité de l’exercice de l’activité pour laquelle la commune la rémunérait. Par ailleurs, la cour administrative d’appel relève que les demandes de la commune, qui visaient à organiser le service, ne pouvaient être regardées comme portant atteinte au secret médical ou révéler un acharnement à son encontre.

Concernant l’absence de déclaration du cumul d’activités, la Cour administrative d’appel considère que le médecin vacataire n’avait commis aucune faute.

En effet, ce médecin vacataire été employée par la commune en qualité de vacataire, suivant les termes de ses contrats, initialement pour une durée de 27 heures hebdomadaires puis, à compter du 1er juillet 2006, à raison de 30 heures par semaine.

La cour administrative d’appel relève que la commune n’avait pas régulièrement informé ce médecin vacataire qu’elle était employée à partir de cette date en qualité d’agent public contractuel.

Par voie de conséquence, l’absence de déclaration ou de demande d’autorisation de cumul d’activités avec les fonctions de médecin de la protection maternelle et infantile exercées par ce médecin depuis 1998 auprès du département de la Seine-Saint-Denis à temps partiel ne peut être regardée comme fautive.

🧿 Proportionnalité du licenciement du médecin vacataire

La cour administrative d’appel considère que la sanction de licenciement de ce médecin vacataire est disproportionnée :

« Au regard des seules fautes établies par la commune, et alors que Mme A…, qui exerçait ses fonctions auprès de la commune depuis plus de vingt ans, n’avait fait l’objet auparavant d’aucune sanction ni de critiques sur sa manière de servir, la sanction de licenciement prononcée à son encontre est disproportionnée. Les décisions attaquées, ainsi entachées d’une erreur d’appréciation, doivent par suite être annulées».

Pour lire l’arrêt : Cour administrative d’appel de Paris, 2ème Chambre, 30 janvier 2024, 22PA03928

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