rejet maladie professionnelle fonction publique

Lorsqu’un agent de la fonction publique territoriale contracte une maladie liée à son activité professionnelle, il peut demander la reconnaissance de cette maladie comme imputable au service. Si cette reconnaissance est acceptée, il pourra bénéficier d’un Congé pour Invalidité Temporaire Imputable au Service (CITIS). Toutefois, cette reconnaissance est loin d’être automatique. Cet article examine les démarches à effectuer, les textes applicables et les recours en cas de rejet.

🔷 Comment solliciter la reconnaissance d’une maladie professionnelle ?

Pour connaître les critères pour qu’une maladie soit reconnue comme maladie professionnelle, il convient de se référer à l’article L822-20 du Code général de la fonction publique qui prévoit 3 situations différentes:

 » [Situation 1] Est présumée imputable au service toute maladie désignée par les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale et contractée dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice par le fonctionnaire de ses fonctions dans les conditions mentionnées à ce tableau.

[Situation 2] Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée par un tableau peut-être reconnue imputable au service lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu’elle est directement causée par l’exercice des fonctions.

[Situation 3] Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu’elle est essentiellement et directement causée par l’exercice des fonctions et qu’elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d’Etat ».

Concernant le taux mentionné pour la dernière des situations, il convient de se référer à l’article 37-8 du décret du 30 juillet 1987 du 30 juillet 1987 relatif à l’organisation des conseils médicaux, aux conditions d’aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux :

« Le taux d’incapacité permanente servant de seuil pour l’application du dernier alinéa du même article du code général de la fonction publique est celui prévu à l’article R. 461-8 du code de la sécurité sociale.

Ce taux correspond à l’incapacité que la maladie est susceptible d’entraîner. Il est déterminé par le conseil médical compte tenu du barème indicatif d’invalidité annexé au décret pris en application du quatrième alinéa de l’article L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite ».

➡️ L’article R. 461-8 du code de la sécurité sociale, ce taux d’incapacité est fixé à 25 % s’agissant, ainsi que mentionné à l’article L. 461-1 de ce code, des pathologies ne relevant pas d’une présomption d’imputabilité au service, telles que les pathologies psychiques.

Pour la deuxième situation, le Conseil d’Etat rappelle régulièrement les conditions :

« une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l’exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu’un fait personnel de l’agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l’aggravation de la maladie du service ». ( voir par exemple : Conseil d’État, 3ème – 8ème chambres réunies, 8 mars 2023, 451972 )

🔷 Quels sont les délais pour formuler la demande ?

Pour formuler sa demande, le fonctionnaire dispose d’un délai de deux ans. Aux termes de l’article 37- 3 du décret n°87-602 du 30 juillet 1987 relatif à l’organisation des conseils médicaux, aux conditions d’aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux :

« II.-La déclaration de maladie professionnelle prévue à l’article 37-2 est adressée à l’autorité territoriale dans le délai de deux ans suivant la date de la première constatation médicale de la maladie ou, le cas échéant, de la date à laquelle le fonctionnaire est informé par un certificat médical du lien possible entre sa maladie et une activité professionnelle ».

Attention :

« Dans tous les cas, lorsque l’accident de service, l’accident de trajet ou la maladie professionnelle entraîne une incapacité temporaire de travail, le fonctionnaire adresse à l’autorité territoriale, dans un délai de quarante-huit heures suivant son établissement, le certificat médical prévu au 2° de l’article 37-2. En cas d’envoi de l’avis d’interruption de travail au-delà de ce délai, le montant de la rémunération afférente à la période écoulée entre la date d’établissement de l’avis d’interruption de travail et la date d’envoi de celui-ci à l’autorité territoriale peut être réduit de moitié ».

De son côté, l’administration doit statuer dans un délai déterminé. Aux termes de l’article 37-5 de ce décret :

« Pour se prononcer sur l’imputabilité au service de l’accident ou de la maladie, l’autorité territoriale dispose d’un délai :

En cas de maladie, de deux mois à compter de la date de réception de la déclaration prévue à l’article 37-2 et, le cas échéant, des résultats des examens complémentaires prescrits par les tableaux de maladies professionnelles. / Un délai supplémentaire de trois mois s’ajoute aux délais mentionnés au 1° et au 2° en cas d’enquête administrative diligentée à la suite d’une déclaration d’accident de trajet ou de la déclaration d’une maladie mentionnée au dernier alinéa de l’article L. 822-20 du code général de la fonction publique, d’examen par le médecin agréé ou de saisine du conseil médical compétent. Lorsqu’il y a nécessité d’examen ou d’enquête complémentaire, l’employeur doit en informer l’agent ou ses ayants droit. / Au terme de ces délais, lorsque l’instruction par l’autorité territoriale n’est pas terminée, l’agent est placé en congé pour invalidité temporaire imputable au service à titre provisoire pour la durée d’incapacité de travail indiquée sur le certificat médical prévu au 2° de l’article 37-2 ou au dernier alinéa de l’article 37-9. Cette décision, notifiée au fonctionnaire, précise qu’elle peut être retirée dans les conditions prévues à l’article 37-9 «  .

Procédure de reconnaissance de l’imputabilité et rôle du conseil médical

Déclaration de la maladie : Le fonctionnaire doit déclarer sa maladie selon les conditions indiquées ci-dessus

Examen par le conseil médical : Le conseil médical est consulté par l’autorité territoriale : » 3° Lorsque l’affection résulte d’une maladie contractée en service telle que définie à l’article L. 822-20 du code général de la fonction publique dans les cas où les conditions prévues au premier alinéa du même article ne sont pas remplies ». ( article 37-6 du décret).

Décision de l’administration : l’administration territoriale prend une décision quant à la reconnaissance ou non de la maladie comme professionnelle. Attention : l’avis rendu par le comité médical est une mesure préparatoire et n’est donc pas n’est pas susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir (pour une application récente : TA Rouen, 22 nov. 2024, n° 2404221).

🔷 Comment contester la décision de refus de reconnaissance de la maladie professionnelle ?

Il convient de saisir le tribunal administratif dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision de rejet. En cas d’urgence, un référé-suspension peut également être formé après le dépôt de la requête en annulation.

🔷 Que se passe-t-il si vous ne respectez pas les délais ?

  • Saisine anticipée :

La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée.

➡️ Il résulte de ces dispositions que lorsqu’un requérant, après avoir présenté une demande à l’administration, saisit le juge administratif avant que celle-ci ne se soit prononcée sur cette demande, ses conclusions, dirigées contre une décision qui n’est pas encore née, sont irrecevables. Cette irrecevabilité peut toutefois être couverte, en cours d’instance, par l’intervention d’une décision expresse ou implicite. (TA Toulouse, 3e ch., 18 oct. 2024, n° 2105435).

  • Saisine tardive

En application de l’article R421-1 du code de justice administrative :

« La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ».

Votre demande sera donc irrecevable.

🔷 Exemples de décisions

  • TA Rouen, 4 ème ch., 21 mai 2024, n° 2301072. : injonction à la commune du Havre de reconnaître la maladie professionnelle et condamnation de la commune du Havre à  verser au requérant la somme de 2 000 euros en réparation du préjudice subi.
  • TA Paris, 12 janv. 2024, n° 2326518 : si votre administration tarde à statuer sur votre demande, vous pouvez saisir le tribunal administratif en référé ( article L.521-3 du code de justice administrative).
  • CAA Versailles, 5e ch., 3 oct. 2024, n° 22VE00982 : sur les délais applicables dans l’instruction des demandes

 

💡La reconnaissance d’une maladie comme professionnelle dans la fonction publique territoriale est une procédure encadrée mais complexe, surtout lorsque la pathologie ne figure pas dans les tableaux prévus par le Code de la sécurité sociale. En cas de rejet, plusieurs voies de recours existent, mais elles nécessitent rigueur et préparation. En cas de doute, il est fortement conseillé de se tourner vers un expert en droit public pour maximiser ses chances de succès.

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Categories: Fonction Publique

Shanffou

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